Bethesda fête le Fallout Day avec des éditions anniversaires et un recyclage qui ne déçoit même pas

Vieux cartons à la place d'innovation

Chaque année, le Fallout Day offre une occasion en or à Bethesda : celle de prouver que le recyclage n’est pas seulement une vertu écologique, mais aussi un modèle économique. Pour les dix ans de Fallout 4, le studio s’offre donc une nouvelle célébration de son propre patrimoine avec une « Anniversary Edition » qui laisse dubitatif. Au menu : un jeu déjà cent fois vendu, des DLC déjà digérés, et un peu de vernis “communautaire” pour faire passer le tout.

L’idée, en apparence, est simple : fêter l’anniversaire du jeu avec une édition regroupant l’intégralité du contenu existant. Fallout 4 Anniversary Edition sortira en novembre 2025 sur toutes les plateformes actuelles, du PC à la PS5 en passant par la Xbox Series. Elle réunira le jeu de base, ses six extensions officielles — Automatron, Far Harbor, Nuka-World et les packs “Workshop” — ainsi qu’un florilège d’éléments du Creation Club : armes, tenues et gadgets déjà bien connus des habitués. On se rappelle que déjà en 2017, l’arrivée du Creation Club avait déclenché une une énorme polémique, au point qu’un mod avait rapidement mis en place pour retirer cette fonctionnalité.

Bethesda en profite aussi pour introduire une nouvelle interface baptisée Creations Hub, censée faciliter la découverte et la gestion du contenu communautaire. Derrière ce nom engageant, on retrouve surtout un énième espace de vente interne : un petit marché bien organisé où se côtoieront créations gratuites de fans et ajouts payants estampillés “officiels”. Et comme la fête est plus belle quand elle s’étend, le studio a aussi glissé une annonce concernant un portage du jeu sur la future Nintendo Switch 2, prévu pour 2026, histoire de ne laisser aucun support indemne. Comme avec Fallout 76 et la série Amazon, il semblerait que Bethesda préfère désormais se reposer sur des projets existants plutôt que d’innover pour le plaisir des fans.

Officiellement, Bethesda se présente comme le gardien de la nostalgie vidéoludique : il s’agirait de “célébrer la communauté”, de “rendre hommage à dix années de créativité partagée”. Dans les faits, c’est une stratégie éprouvée — qu’on pourrait baptiser “le traitement Skyrim” : reconditionner le même jeu, lui coller un ruban doré, et le ressortir en espérant que la fanbase réponde encore présent.

 

 

La manœuvre n’est pas nouvelle, mais elle devient presque fascinante par sa régularité. Fallout 4 a déjà eu droit à son édition GOTY, à une version VR, à une mise à jour next-gen ; le voici désormais prêt à se réinventer… sans rien changer. L’ironie, c’est que Bethesda le fait avec un sérieux imperturbable, comme si chaque repackage était une offrande sacrée, alors qu’il s’agit surtout d’un tour de passe-passe marketing.

Le discours autour de la “valorisation des moddeurs” participe à cette illusion. En intégrant le Creations Hub, Bethesda se pare des atours de la bienveillance : on vous donne les outils, on vous ouvre la scène, on célèbre votre travail. Mais l’autre face du miroir est moins reluisante : c’est aussi une façon d’enfermer la créativité communautaire dans une boutique contrôlée, où l’éditeur encadre, filtre et parfois (souvent ?) monétise ce que les fans produisent. On pourrait presque parler de sous-traitance affective : les joueurs créent, Bethesda encaisse la gratitude – et une partie des bénéfices.

 

 

Et côté nouveautés ? Pas grand-chose à se mettre sous la dent. Les fans espéraient peut-être un remaster technique, des graphismes retouchés, des performances modernisées. Mais la communication officielle reste évasive : aucune refonte moteur, aucun lifting annoncé, seulement une “expérience complète” — formulation délicatement vide, qui a l’avantage de ne rien promettre. Tout cela arrive, par un heureux hasard du calendrier, quelques semaines avant la sortie de la saison 2 de la série Fallout sur Amazon Prime – un alignement cosmique qui ne doit rien au hasard. L’éditeur espère sans doute que la ferveur médiatique autour de la série se traduira par un regain d’intérêt pour Fallout 4. Une manœuvre habile, certes, mais aussi terriblement cynique : capitaliser sur la nostalgie des joueurs tout en leur resservant, au centime près, le même menu.

La question qui fâche reste entière : cette “édition anniversaire” sera-t-elle gratuite pour les possesseurs du jeu ? Bethesda reste muet sur le sujet. Et quand une entreprise garde le silence à ce point sur la question du prix, c’est rarement bon signe. Les joueurs, eux, oscillent entre résignation et sarcasme : après tout, ils ont l’habitude. Ceux qui ont déjà acheté Fallout 4 trois fois se demandent si cette nouvelle version leur offrira, au moins, le droit de la racheter une quatrième.

Bethesda maîtrise à la perfection cet art du recyclage souriant : celui qui consiste à remercier la communauté tout en lui facturant sa fidélité. Derrière le vernis des célébrations, on retrouve le même moteur, la même interface, la même poudre aux yeux — et trop souvent, les mêmes bugs. Dix ans après, Fallout 4 revient donc sur le devant de la scène. Pas grâce à une innovation technique ou artistique, mais grâce à une stratégie simple : ne jamais rien laisser mourir, tant qu’il reste quelques fans prêts à repasser à la caisse.

Finalement, ce Fallout Day 2025 aura au moins une vertu : celle de rappeler que chez Bethesda, la fin du monde est peut-être pour demain, mais la fin des rééditions… jamais.

 

 

Avec un sourire amer, on peut rappeler que ce Fallout Day était largement attendu par les fans, tant pour l’annonce d’un Fallout 5 que du remake de Fallout 3, deux projets sur lesquels les spéculations – et espoirs – vont bon train.

Mais comme nous l’avons vu de nombreuses fois avec Skyrim, Todd Howard et ses cadres préfèrent revivre et ressortir le passé pour en presser le moindre profit, quitte à salir l’héritage d’une licence de RPG autrefois si iconique.

 

 

 

 

Rédacteur en chef de ce p'tit site bien sympatoche ! Amateur de jeux stylés, point bonus s'il y a une histoire riche et/ou des blagues de gamin. Dispo sur Twitter : @RealMimil

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